vendredi 4 décembre 2015

L'épouse de la liberté


J'ai multiplié les mariages sans n'être que restée l'épouse de ma liberté. Je danse avec elle. 
J'ai vu dansé, fêté, pleuré, maquillée, sous les tissus et les matières poudrées les visages et j'ai voulu témoigné de l'existence d'un mot qui est peut-être le moins évoqué, j'ai voulu inviter, pour le temps de lever de soleil, j'ai touché de près, oui, je suis je l'avoue meilleure consommatrice de l'oisiveté, et frôlé et rêvé, droit fondateur, de ce prince fortuné, mangé à l'envie sans en tirer parti, j'ai pour époux le meilleur ami qu'est cette liberté. Seule dans cette voiture, ici, là, les petites plages de cette capitale à l'allure d'un village, j'ai roulé, au rythme de la voix de Yasmine Hamdan, puis pleuré, un peu, la tristesse est l'émotion qui colore mes journées, c'est ce qui m'habite, c'est qui me donne raison d'agir, pas le sourire, mais le triste, le nostalgique, j'ai mal à la tête et je suis seule et c'est cela qui donne couleur à mes jours.

Je suis pauvre, dans cette voiture la plus pauvre sûrement de ce royaume de l'or noir, je suis pauvre et j'ai fait quelque chose qui ne permet pas d'acquérir des milliers, assise avec des femmes, les écouter parler, m'expliquer mille fois les mêmes différences, les mêmes interrogations, les chocs de culture, le frottement des images et idées, les confrontations de visions, ces hommes fortunés desquels on peut vivre au crochet, mais assise par terre sur ces nattes de plastique, mais fumer mon narguilé sans impunité, mais être ici, je me sens seule et j'aime cela. J'aime être triste d'être seule, j'aime être triste, j'aime être seule, ma solitude est ma clef. La solitude m'a ouvert des routes qui ne donne pas la sérénité que j'aurais pour m'assoir le soir à lire du Qabbani en buvant un thé, j'ai un feu violent ou plutôt un triste torrent qui me bouscule et m'assaille tous les jours, une cavité de solitude qui est ma clé, qui m'enferme et m'ouvre les deux à la fois, une langueur à plusieurs notes qui se répète et qui m'ouvre et qui m'enferme et qui me serre dans mes bras. J'ai mon partenaire pour la vie, c'est cette forme-là de liberté. Elle sonne comme de beaux textes à écrire, de jolis livres à lire, cette fermeture de la parole, cet isolement golfien qui était déjà là, cet épuisement intérieur qui regorge toujours plus de profondeurs en fait, ces tuyaux plein de mots que je préfère taire pour coucher au papier. 

Je suis mariée, et c'est avec la liberté. 

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