samedi 27 septembre 2014

Soufre

Voilà, alors, il y a la page blanche, et puis on prend la main. 

On va à la ligne.

On commence. On enfile les perles, on enfile les mots. Métaphore basique et, la page et les perles, on se retrouve dans un film populaire à la française.

Et puis on réfléchit, on pousse un peu, et là boum, une lumière dans une obscurité surgit. On s'y dirige. On y va. On s'approche, la lumière est bien sûr plus dense. Mais il y a des parois, on réalise que l'on est dans un tuyau. Un long tuyau. On y va, on y marche, on tâtonne mais quand même, on est curieux. Alors les pieds dans le liquide sur les parois, on avance quand même, on y va. En fait c'est l'histoire de tuyaux baveux et plus on s'approche, mais de quoi on ne sait pas, plus on voit que c'est l'histoire de tuyaux remplis de soufre, oui du soufre. Comme si on était dans un volcan, dans un corps humain, sur un quai de Jemmapes en grisaille, on se dit bon, peut-être qu'il faudrait faire attention, peut-être qu'en fait nos pieds ne sont pas en sécurité, attention, ne pas toucher les bords visqueux, mais on n'est pas dans un volcan, on est bien dans un corps humain, tout englué de vie et viscères, de calcaire âpre et austère, calomnieux au regard et hautain à l'odeur. On s'exécute. On sait qu'il y a quelque chose à faire qu'il faut faire quelque chose. Car là où l'on est, on risque quelque chose, on risque pour notre vie. C'est comme un cordon ombilical moisi qui prend forme et on sait au fond de nous-même le but de la sortie et l'on ne ressent au moment où on le vit.
Le corps étouffé par le soufre, les poumons enfumés de fumerolles dangereuses, les nerfs arrachés, les yeux embourbés, le foie et les reins disséqués et en vie on opère. On est à l'opéra de la vie. On perd. On est à la roulette de l'avenir. On ignore et on sait. On sait que l'on ne sait pas. On ignore que l'on sait que l'on ignore. 

On s'intoxique, on peine à venir, on écarquille bêtement les mains et on opère, opéré, opérant, le corps perd ; et perdus, éperdument, on souffre.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire